• Raphaëlle Journée 43

    Un jour à Paris en 1943

     

         Au début de cette journée du 18 mai 1943, Mme Castelbac emmena huit de ses onze enfants à l'école Bossuet dans le 10e arrondissement avant d'aller elle-même enseigner dans sa classe. Son premier cours étant l'enseignement ménagé familial, elle y retrouva la plus grande de ses filles qui avait 13 ans. Mme Castelbac ne voyait pas l’intérêt de ce cours ; elle s'en était bien passée pendant sa scolarité et trouvait donc absurde cette loi de mars 1942 qui l'avait rendu obligatoire pour les jeunes filles.

     

     

         A midi, elle déjeuna avec les autres enseignants à la table qui leur était destinée pour pouvoir surveiller les élèves mais n'avala presque rien de son déjeuné. La viande, un poumon de bœuf, flottait dans une bouillie de haricots trop cuits. Elle se contenta de quelques bouchées et du petit pain qui lui était attribué.

     

         Après le repas, Mme Castelbac rentra chez elle car elle n'avait pas de cours l'après-midi. Pour arriver à son appartement, elle dû passer par le jardin du Luxembourg qui était désert à cette heure. Elle était presque arrivée aux portes du jardin quand elle entendit le bruit rythmé des bottes de soldats d'une patrouille allemande qui marchait juste derrière elle. Elle se retourna et se jeta rapidement sur le côté pour laisser passer les soldats de l'occupation. Elle avait l'habitude de ce climat avec des contrôles, des arrestations et même parfois des des fusillades et cherchait à ne pas se faire remarquer.

     

         Ayant réussi à passer inaperçue une nouvelle fois, elle traversa rapidement la rue pour rejoindre son appartement du 16 rue de Condé. Une heure plus tard, elle ressortit de chez elle et alla faire ses courses. Elle passa d'abord chez l'épicier et dépensa une grande partie de ses tickets dans l'achat de pommes de terre et de navets. Une femme derrière la regarda de travers lorsqu'elle sortit tous ses tickets de rationnement. Mme Castelbac l'ignora. Elle avait l'habitude maintenant de ces regards suspicieux et un point malveillant. Qui pouvait se douter qu'elle avait treize bouches à nourrir ?

     

         De retour dans son appartement, elle fit le repas du soir et lu son courrier. La première lettre qu'elle ouvrit fut celle de son fils aîné Michel. Ses trois aînés avaient été envoyés en pension à St Dié dans les Vosges pour être en sécurité. Elle relue aussi sa dernière lettre qu'il leur avait envoyé la semaine précédente. Elle fut triste, cependant, qu'il ne vienne pas les voir pour les vacances mais soulagée aussi ; Paris était devenu une ville dangereuse ! Il fallait qu'elle lui écrive. Elle sentait dans sa lettre que leur éloignement lui était difficile comme il l'était pour elle. Elle lui enverrait aussi quelques tickets et de la farine. Il les partagerait avec ses frères.

     

         Le soir, toute la famille se mis à table et on mangea les pommes de terre avec appétit. Malheureusement, le repas fut interrompu par une sirène annonçant un bombardement aérien. Mme Castelbac rassembla tous ses enfants, pris dans ses bras le plus jeune qui pleurait de fatigue et aida son mari à prendre des couvertures au cas où ils ne pourrait pas revenir avant le lendemain.

     

         La famille descendit ensuite en courant les escaliers de l'immeuble et suivit la foule qui se dirigeait vers les bouches de métro. Les enfants se tinrent par la main pour ne pas se perdre dans cette foule qui courrait. N'ayant pas de cave à Paris, les parisiens se retrouvèrent bientôt tous à l'étroit dans les stations de métro. La famille Castelbac se trouva un petit coin dans une station et les enfants purent s'asseoir en attendant la fin de l'alerte qui ne dura pas. Ils avaient tous une couverture pour dormir mais tous restaient éveillés dans l'attente d'un bombardement qui ne vint pas. C'était une fausse alerte.

     

         La famille Castelbac rentra chez elle et Mme Castelbac se coucha ce soir là avec une certaine lassitude. La guerre durait maintenant depuis 4 ans, il était temps que viennent des jours meilleurs.

     

    Ticket de rationnement, 1943

     

     

     

     

    Lettres de mon grand-père à sa mère, 1943

     


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